Pour une écologie politique libre et indépendante.

Le dépassement de toutes les limites de la Terre est désormais avéré.

Notre pays n’est pas épargné par les effets du changement climatique, suscitant une angoisse légitime face à des phénomènes non maîtrisés. La sous-estimation des risques et pénuries généralisées dans les services publics nous oblige
à faire émerger une écologie politique innovante; une écologie qui dépasse les contradictions de ce monde, assume sobriété et partage plus équitable des richesses et conjure dans le même temps les tentations de démocratures et dictatures.

Le moment est venu de construire une véritable offre de l’écologie politique en France car elle n’existe pas. Cela peut paraître paradoxal mais c’est une réalité. L’écologie politique, telle qu’elle est représentée aujourd’hui dans notre pays, est réduite à l’émergence d’un mouvement politique désormais clairement ancré à l’extrême gauche, une prétendue « NUPES » qui ne répond ni aux besoins de l’écologie ni aux souhaits d’une majorité de Français, en dépit de l’angoisse écologique qu’ils expriment au regard des bouleversements que connaît notre monde. D’où l’incapacité à convaincre nos concitoyens et la sphère politique del’urgence écologique. Contrairement à ce qu’aurait pu laisser espérer la constitution d’un groupe écolo à l’Assemblée nationale, l’écologie politique a en fait complètement disparu des radars pour se fondre dans les obsessions exprimées de manière violente par LFI, formation majoritaire au sein de la NUPES.

Avec des membres qui, pour l’essentiel, n’ont rien à voir avec l’écologie voire pire, déconsidèrent les propositions écologistes aux yeux de beaucoup de nos concitoyens. La disparition d’une écologie politique libre et indépendante, tant pour des raisons idéologiques – le triomphe d’une écologie
clivante – que financières – le besoin de se renflouer avec le financement public après l’échec des présidentielles -, crée à l’évidence un grand vide qu’il est urgent de combler, tant les attentes et les enjeux pour notre planète et ses habitants sont importants.

Quant aux écologistes qui n’appartenaient pas cette mouvance, ils ne sont pas parvenus à créer au coeur de l’échiquier politique français un pôle attractif. Cette cartographie a explosé sous le double coup de boutoir de l’absorption de EELV par la NUPES et de la transformation de l’impératif écologique.

Mais l’essentiel n’est pas là.

La prise de conscience, qu’il s’agisse de l’urgence écologique, de la souffrance animale ou encore de la détresse du vivant mais aussi parce que nous sommes entrés dans un Nouveau Monde qui impose des transformations profondes et rapides, change complètement la donne. En effet, être catastrophiste ou donner l’impression de l’être n’a plus de sens dès lors que la catastrophe a commencé. Ce qui compte aujourd’hui ce sont les conditions dans lesquelles nous serons demain en capacité de transformer notre société pour faire face aux enjeux climatiques, écologiques et sociaux auxquels nous sommes confrontés et auxquels nous ne pouvons plus échapper. Pour y parvenir, nous devons créer le consensus le plus large possible pour rendre l’adaptation non seulement réalisable mais aussi souhaitable, ce qui signifie tout simplement de changer notre imaginaire.

Les rapports du GIEC et de l’IPBES(1) comme ceux du Haut Conseil pour le Climat sont sans ambiguïté. Or, ce n’est ni dans l’opposition ni dans la violence que peut se créer ce consensus mais au contraire dans la recherche de solutions concrètes, justes et efficaces, rendues d’autant plus difficiles que l’inflation, la réduction du pouvoir d’achat, le mal être, la perte de l’espoir chez beaucoup sont des contraintes redoutables. Pour faire de ce sujet de la grande transformation, qui intègre bien-sûr l’adaptation, le sujet majeur et l’imposer dans le débat public, il faut une dynamique inexistante aujourd’hui au niveau politique.

Nous tous proposons donc à tous les mouvements écologistes ne se retrouvant pas dans la NUPES mais aussi à tous les militants écologistes libres, de nous rejoindre.
Nous voulons créer cette dynamique pour permettre à de véritables cercles vertueux de se mettre en place. Tout d’abord, il faut sortir des exclusives et des étiquettes qui ne correspondent plus à rien. Il existe dans nombre de mouvements politiques non-écologistes des personnalités qui ne parviennent
pas, au sein de leur famille politique, à faire changer les choses. La dynamique de l’écologie politique que nous voulons instaurer a précisément pour objectifs d’être une force d’attraction et de permettre à toutes les bonnes volontés de puiser dans les propositions et le projet des arguments de conviction de toutes celles et ceux qui ont à coeur de faire avancer notre société.

Mais la sphère politicienne est aujourd’hui l’objet d’une grande défiance et la transformation de la société se fait largement en dehors d’elle. C’est la raison pour laquelle la force que nous souhaitons incarner a pour objectif principal de motiver nos concitoyens à conforter leur action sur le terrain par
la participation à un objectif plus large. Donner envie de s’investir à tous les niveaux, y trouver un intérêt mais aussi donner ou redonner un sens à sa vie.

Tel est l’objectif, les moyens à mettre en oeuvre résultant de la capacité de donner à chacun d’agir. Chefs d’entreprise, responsables investis dans la
transition écologique, acteurs de terrain économique, associatif, agriculteurs engagés dans les nouvelles pratiques, citoyennes et citoyens, nous les invitons tous à nous rejoindre pour prendre toute leur place dans une structure de rassemblement originale, qui donnera une place équivalente aux
acteurs politiques et aux acteurs de la société civile.

Il s’agit plus que jamais de la vie des générations futures, celle de nos enfants et de nos petits-enfants.

Avec une réalité à intégrer : les générations présentes supportent d’ores et déjà les effets des dérèglements écologiques auxquels nos modes de vie et de faire nous ont conduits.

Si la politique a un sens, c’est bien celui de rendre la vie de la cité possible et souhaitable pour toutes et tous. C’est tout le sens de l’action que nous devons mener. Non seulement parce que nous en avons la responsabilité mais aussi parce que nous en avons encore aujourd’hui la possibilité.

(1) Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services économiques

Premiers signataires :

  • Corinne Lepage, Cap21-LRC
  • François Bechieau, Mouvement des Progressistes
  • Alexis Boudaud-Anduaga, L’Ecologie Autrement
  • Dominique Bourg, philosophe
  • Chantal Cutajar, Citoyens engagés
  • Jean-Marc Governatori, Ecologie au Centre
  • Isabelle Jacono, France Ecologie
  • Maud Navarre, élue ex EELV
  • Christophe Rossignol, Liberté, Egalité, Fraternité
  • Aloïs Lang-Rousseau, Mouvement Hommes Animaux Nature

Tribune collective parue dans Le Monde du 30 août 2022